La comète 46P visible à l'oeil nu

Qu’est-ce qu’une comète ?

Les comètes font partie des « petits corps » de notre système solaire (comme les astéroïdes par exemple). Ce sont des objets de quelques kilomètres dans leur plus grande dimension, plusieurs dizaines pour les plus grandes. En raison de cette petite taille, et en comparaison aux planètes, elles sont très irrégulières (souvenez-vous de la forme de Tchouri !). C’est aussi pour ça qu’il est très difficile voire impossible d’observer directement le noyau d’une comète depuis la Terre. On observe en réalité sa queue de poussières et de gaz.

A gauche, la comète C/2006 P1 (McNaught) observé en 2012 depuis l’hémisphère sud. A droite, la comète C/1995 O1 (Hale-Bopp) observable durant 18 mois en 1996/1997 !
Crédits : S. Deiries/ESO ; E. Kolmhofer, H. Raab – Johannes-Kepler-Observatory, Linz, Autriche.

En effet, les comètes sont composées majoritairement de glaces (glace d’eau, mais aussi glace de dioxyde de carbone etc…) contrairement aux astéroïdes. Cependant, silicates – roches communes composant les planètes telluriques – et matière organique – désignant généralement de grandes molécules complexes à base de carbone – sont aussi présents et en font des objets très sombres. Les comètes sont aussi très poreuses : leur densité est plus faible que celle de l’eau !

Le noyau de la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko observé par la sonde Rosetta.
On y distingue les jets de gaz et de poussières, synonymes de l’activité (sublimation des glaces).
Crédit : ESA/Rosetta/NAVCAM

Pourquoi peut-on observer 46P/Wirtanen et que va-t-on voir ?

La plupart des comètes ont des orbites elliptiques : l’écart entre l’aphélie (point le plus proche du Soleil) et le périhélie (point le plus éloigné du Soleil) est important. Lorsque la comète se rapproche du Soleil sa température augmente et les glaces qui la composent se subliment : celles-ci passent de l’état solide à l’état gazeux.

L’expulsion de ces gaz conduit à des processus complexes. En plus d’entrainer avec eux la poussière de surface, de nombreuses molécules, atomes et ions se forment dans la coma, constituant un halo autour du noyau de la comète.
Généralement, deux queues émergent du noyau et de la coma et peuvent être visible quand on observe une comète depuis la Terre : la queue de gaz, souvent d’aspect bleuté, et la queue de poussière, plutôt blanche et bien visible car elle réfléchit efficacement la lumière du Soleil. A l’œil nu, dans notre transat ou avec notre boisson chaude, on observe donc plutôt cette queue de poussière qui peut rendre le phénomène si impressionnant.

La comète 46P/Wirtanen prise en photo le 26 Novembre.
Crédit : Gerald Rhemann.

Prévoir l’activité d’une comète est un exercice difficile. La surprise n’en est que renforcée car toutes les comètes sont différentes (morphologie, quantité de glaces…). Le spectacle est donc unique pour chaque comète et à chaque passage !

Ce 12 décembre, la comète 46P/Wirtanen, qui fait le tour du Soleil en 5 ans et demi environ, sera au plus proche de l’astre du jour avec une distance de 1.055 unité astronomique, soit 157 millions de kilomètres (c’est la distance qui sépare la Terre du Soleil environ). Ensuite, le 16 décembre, c’est de la Terre qu’elle sera le plus proche, à seulement 11,6 millions de kilomètres (soit 30 fois la distance Terre-Lune).
On l’aura compris, ce début du mois de décembre est la bonne période pour observer 46P/Wirtanen.
Mais comment s’y prendre ?

Quand, où et avec quoi observer ?

Entre le 10 et le 20 décembre, 46P/Wirtanen voit sa magnitude (ou luminosité) varier de 4 à 5 au mieux, selon les estimations. Cependant, la comète s’étend sur 1° à 1.5° sur le ciel et cette magnitude n’est pas équivalente à celle d’une étoile de même luminosité. Au final, 46P/Wirtanen devrait briller un peu plus faiblement que M31, la galaxie d’Andromède. Elle est donc visible à l’œil nu sous un ciel bien noir et peu pollué par les lumières ; pour les citadins ce sera plus difficile mais pas impossible. Il est alors préférable d’utiliser des jumelles. L’avantage des jumelles va être de capter plus de lumière mais aussi d’offrir un grossissement confortable tout en gardant un champ d’observation assez large.

Entre ces deux dates, pour un observateur situé à Paris par exemple, 46P/Wirtanen va évoluer entre la direction du Sud – Sud-Est, à une hauteur allant de 38° à 60° au-dessus de l’horizon (notre main écartée tendue devant nous fait environ 20°). Elle se trouve alors entre les constellations de la Baleine (à droite) et du Taureau (à gauche). Entre le 13 et le 16 elle est non loin d’Aldébaran, étoile principale de la constellation du Taureau, à l’éclat orangée. Le 16 est sans doute le meilleur jour, sa faible distance à la Terre tombe au moment où elle se trouve entre Aldébaran et les Pléiades, amas d’étoiles facilement reconnaissable. Après cette date, elle se rapproche de Capella, du même éclat qu’Aldébaran mais plutôt blanche et dans la constellation du Cocher.

Notre comète est bien sur observable au télescope. Avec un oculaire qui ne grossit pas trop, il devrait être assez aisé de la trouver le 15/16 décembre par exemple, en balayant la région du ciel entre Aldébaran et les Pléiades. Pensez aux autres spectacles du moment : les Pléiades bien sur mais aussi la Lune, Mars ou encore la nébuleuse d’Orion !

Position de 46P/Wirtanen dans le ciel le 16 décembre. Capture d’écran extrait du logiciel gratuit Stellarium.
Pensez à l’utiliser pour repérer la position de la comète au fil des jours et selon votre lieu d’observation !

Pour les plus aguerris il est possible de photographier la comète. A travers un télescope cela demande déjà un certain niveau mais il est tout à fait possible de la photographier avec un paysage ou un monument en premier plan. Pour cela utiliser un appareil pouvant photographier quelques secondes et utiliser un trépied. Voyez l’Astronomy Picture Of the Day du 7 décembre par exemple.

L’anecdote

La comète 46P/Wirtanen est loin d’être inconnue au bataillon. Avant d’être retardée au lancement, la mission Rosetta n’avait pas pour cible 67P/Churyumov-Gerasimenko (alias Tchouri) mais bien…46P/Wirtanen ! Ceci dit, elle n’est pas rancunière et nous offre un joli spectacle en ce mois de décembre 2018.

Une dernière chose ?

Encore un nom compliqué pour une comète ? Mais non ! Mettons les choses au clair. Le nom de tous les objets du système solaire est régi par des règles dictées l’UAI, l’Union Astronomique Internationale. Pour les comètes, cela fonctionne de la façon suivante :

  • Le nombre qui se trouve en première position est utilisé pour donner un nom définitif à une comète périodique confirmée. Ce nombre augmente donc à chaque attribution. 46P/Wirtanen n’est autre que la 46ème comète périodique confirmée ; 1P/Halley est la première etc.
  • La lettre qui suit indique la nature de l’orbite : P pour périodique, C pour non périodique, X pour une comète dont l’orbite n’est pas certaine ou qui n’a pu être déterminée et enfin D si la comète n’existe plus ou si on pense qu’elle a disparu.
  • Enfin, on trouve en dernière le nom du ou des personnes ou entités ayant découvert la comète. Ici il s’agit de l’astronome Carl Alvar Wirtanen (1910 - 1990). Il peut aussi s’agir d’un programme d’observation ou d’un satellite comme LINEAR ou SOHO. Ce nom est également attribué.

Batiste Rousseau

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